​La lettre ouverte d’Alphoussounou Sane au ministre Abdourahmane Diouf 

  Monsieur le Ministre,. Je me permets de vous adresser ce message suite à votre intervention dans l’émission “En Vérité” sur la RSI, diffusée le 26 octobre 2025. Vos propos, largement relayés par la presse, appellent une réflexion approfondie sur la nature de la justice et les fondements de la réconciliation nationale.. Vous y avez appelé au pardon, mis en garde contre une « justice des vainqueurs », et invité le Président de la République à ne pas accepter que « le pays sombre dans la division ». Ces paroles, portées par votre double légitimité de ministre et d’universitaire, ne sauraient rester sans réponse, tant elles touchent à l’équilibre des pouvoirs et à la confiance des citoyens dans leurs institutions.. S’il est noble de prôner le pardon et l’unité, il convient de rappeler que ceux-ci ne sauraient se construire sur l’impunité ou l’affaiblissement de la justice. Une réconciliation véritable ne peut émerger que de la vérité et du respect strict de l’indépendance de la justice. Or, évoquer le risque d’une « justice des vainqueurs » revient, même involontairement, à jeter un doute sur l’impartialité des procédures en cours et à fragiliser la légitimité même de l’État de droit.. Par ailleurs, votre position au sein du Conseil des ministres vous place au cœur de l’action gouvernementale. S’exprimer publiquement pour enjoindre le chef de l’État à « assumer ses responsabilités » dans un domaine aussi sensible que la justice peut être perçu comme un double langage, susceptible d’entraver la cohésion gouvernementale et d’alimenter la défiance. Dans toute institution, une telle prise de position publique irait à l’encontre des principes de loyauté et de collégialité qui fondent l’action collective.. Enfin, la question essentielle demeure : quel est l’intérêt du peuple sénégalais dans cette affaire ? La paix sociale ne saurait reposer sur l’oubli des injustices ou la suspension du processus judiciaire. Ce n’est pas en entravant la marche de la justice que l’on construit une nation solide, mais en garantissant son autonomie et son intégrité. Le Sénégal a besoin d’institutions fortes, non de raccourcis politiques au nom d’une unité de façade.. Je vous soumets donc, Monsieur le Ministre, que le véritable enjeu n’est pas de choisir entre justice et réconciliation, mais de permettre à la première de servir la seconde. C’est en honorant l’exigence de justice, sans complaisance ni calcul politique, que le Sénégal pourra véritablement se rassembler et avancer.. Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de ma considération distinguée.. Alphoussounou Sane 

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